Cela fait une semaine. Depuis ma dernière rencontre avec Bart. Si on m’avait dit, il y un peu plus d’un mois, que l’un de mes premiers soucis sur le sol américain allait être mes émois pour un garçon… J’aurais ri, très fort. Ça me semblait peu probable et je n’arrive toujours pas à croire que ce soit le cas. Mais c’est la vérité, Bart a rapidement pris une place importante. Depuis notre rencontre sur la plage – pas l’officielle mais celle qui compte vraiment, finalement – jusqu’aux messages envoyés régulièrement et les rencards volés ici et là. Jusqu’au jogging à 4 heures du mat’, qui se termine dans un restaurant avec la promesse de rester, parce que le sentiment était mutuel, avant le rude rappel à la réalité qui n’est jamais aussi simple que ça. Je suis partie rapidement après avoir vérifié qu’il se remettrait de la bagarre qu’il a provoqué, ne voulant pas écouter ses excuses et que ça se termine en dispute qu’on pourrait regretter plus tard. On avait besoin de temps pour se calmer et que les tensions disparaissent, lui comme moi. Sauf que si ce temps n’aurait pu durer qu’une journée ou deux, il dure depuis une semaine. Par ma faute, et je le vis assez mal – je suis agitée et impatiente, m’énervant pour tout et incapable de tenir en place. C’est parce que Bart a dit qu’il aurait le cœur brisé si on cessait de parler, et que c’est le sort que je lui réserve parce que je ne sais pas quoi faire et je m'en veux. C’est parce que c’est le bordel, dans mon cerveau et mon cœur et ma vie en général, et que je ne sais plus quoi faire, penser, désirer.

Je me suis dit que du temps éloignée de lui me ferait du bien et que je pourrais faire le tri dans tout ça et trouver une solution. Sale idée. Le seul tri que je fais, c’est celui de l’appart des Jaroszewicz-Kowalski. J’ai reçu mon premier salaire, qui fait office de piqûre de rappel parce que ça veut dire que ça fait un mois que je suis là, et j’ai finalement cédé à cette virée shopping pour la déco et les accessoires de rangement. C’est le week-end, je ne travaille pas et je suis seule à la maison – les Jarosz sont à une retraite de couple en dehors de la ville et Dawn est en répèt’ tout le week-end – alors je range, pour éviter de réfléchir. Sauf qu’au bout d’un moment, ça ne m’amuse plus tellement et tout est en ordre alors je m’échoue sur mon lit. J’avise mon ordinateur et tente de faire appel à la raison et de continuer le tri. Pour Bart, j’ai fait un tableau Excel. Enfin, j’ai essayé, pendant deux bonnes heures. Mes catégories sont tordues et les listes très inéquitables, il y a des trucs pas classés plus à droite et tout est… Autant en bordel que celui qu’il y a dans ma tête, en fait. Je tire une moue devant ma dernière cellule isolée. « i miss him. » Ça ne rentre ni dans le « what i like about him » ou le « what annoys me », ça. La première liste est bien plus longue que la seconde, « when he kisses me on the head » étant la première case d'une quinzaine, alors que la seconde liste n’en a que trois « hp obsessed », « doesn’t know about poland », « likes beating up ppl ». En bref ? Quelques deux heures de perdues. Au final, j’ai juste envie de lui envoyer un message ou de l’appeler – et je me saisis impulsivement de mon portable toutes les dix minutes pour ça avant de me raviser. À la place, j’envoie un message à ma meilleure amie pour l’informer que je déteste les hommes, même si elle ne va sans doute pas me répondre de suite.

Je sursaute au premier bruit bizarre près de la fenêtre. Il pleut, il y a sans doute du vent, ce n’est pas grave. Le deuxième m’inquiète un peu plus, avec la délicate et malvenue pensée de ‘je suis toute seule à la maison et on est venu m’assassiner’. Je finis par me lever de mon lit, priant qu’il s’agisse bien du vent et pas d’un animal bizarre… J’hésite avant d’ouvrir la fenêtre, le troisième coup surgit et j’identifie la cause : un objet de type sphère. Holy fuck. C’est effectivement sur un animal bizarre que je pose le regard, en bas. Bart. Holy. Fuck. J’oublie comment respirer et reste figée quelques secondes, jusqu’à ce qu’il ne décide d’ouvrir les bras – comme si sa présence ici et cette manière d’attirer mon attention est la chose la plus naturelle du monde. « Can we talk ?! » J’ai l’impression d’être dans un mauvais film ou une très bonne pièce de théâtre, tout d’un coup. Mes sourcils se froncent et je hoche légèrement la tête. « Are you serious right now ? » Je marmonne, plus pour moi-même que pour lui. « Please. » Un esclaffement nerveux m’échappe. Bah bien sûr, pas de problème, et puis tu veux que je te lance ma longue chevelure pour que tu grimpes à la fenêtre ou bien on reste à papoter sous la pluie parce que c’est plus romantique ? Je m’apprête à lui demander de faire le tour lorsqu’il se met en mouvement, disparaissant de mon champ de vision quelques secondes. Je me penche un peu plus pour le voir en train d’escalader la gouttière. Ce con a dû lire dans mes pensées et les applique au pied de la lettre. « What the fuck are you doing ?! » Je m’exclame, à un niveau de décibels suffisant pour qu’il m’entende cette fois. Il m’entend mais il ne m’écoute pas. Il est déjà au premier étage. « Bart ! You’re going to slip ! » For fuck’s sake. Mon rythme cardiaque est effréné et je sens que mon cœur va lâcher s’il continue. Disons que je n’ai pas très envie d’appeler mes collègues pour qu’il vienne récupérer à la petit cuillère ce qu’il reste de Bart parce qu’il a voulu jouer au chevalier. Mais il y arrive, finalement, et s’assoit sur le rebord de ma fenêtre. He’s so fucking stupid, oh my…

C’est donc la glorieuse vision d’un Bart trempé et essoufflé, fenêtre ouverte derrière et cheveux aux vents qui vient d’apparaître dans ma chambre. Mon cœur se remet à peine de sa course, des vagues de choc parcourent tout mon corps. « Oh for… Do you know that doors exist ?! » Je m’exclame, pour l’accueillir. Il est un peu à contre-jour mais je peux clairement discerner le bleu violacé près de son œil, et sa lèvre toujours fendue en train de cicatriser. Souvenirs indésirés. « I really need to talk to you. » D’accord, mais c’est pas tellement une raison pour grimper jusqu’à ma fenêtre ? J’échappe un dernier souffle nerveux, passe une main sur mon visage avant de me mettre à soupirer. « I’m not… Mad at you. » S’il est là pour ça… Il n’avait vraiment pas besoin de se donner autant de mal, bordel de Zeus. « Hi. » Il finit par lâcher, les sourcils froncés. Le choc se dissipe petit à petit, mes sourcils à moi se défroncent et le cerveau finit par se remettre en marche. Bart est là. Pour me voir, si je n’interprète pas mal la petite scène qu’il vient de causer. Mes lèvres s’étirent en un sourire et je me mets à rire doucement avant de lui répondre. « Hi. You’re stupid, you know that ? » He invented a different kind of stupid. Et il est trempé, aussi. Je lève une main vers lui pour lui faire signe de ne pas bouger. « Don’t move. Take your clothes off. You’re making a mess in my room. » Et j’ai passé trop de temps à la ranger pour la voir souillée par Romeo, merci bien. Je garde mon regard dans le sien quelques secondes, réalisant que je lui demande clairement de se dessaper dans ma chambre, avant de lui tourner le dos pour aller lui chercher de quoi se changer. J’ai eu le temps de terminer les lessives, alors je me permets de voler un pantalon de jogging et un tee-shirt à Szymon – ce ne devrait pas trop lui manquer. J’observe mon reflet lorsque je passe devant le miroir du couloir. Mes ugly clothes du jour consistent en un short et un soutien-gorge de sport, couverts d’un gilet bleu nuit pour homme et dix fois trop grand pour moi, ce qui recouvre à peu près bien le tout mais reste assez dénudé quand même. Fuck. J’étais seule, à l’origine, en même temps… Je relâche un autre soupir – plus tendu celui-ci, avant de retrouver Bart dans ma chambre. Mon cœur loupe plusieurs battements et mon estomac se contracte parce qu’il m’a obéit. Je lui tends doucement les habits, observant au passage son torse – y’a un bleu par là aussi. « You don’t look very pretty. » Je lui dis, me mordant légèrement la lèvre. Parce qu’on touche du doigt le problème, non ?

« Yes. I wanted to but I don’t know if Dawn and her parents were here and if you would have picked my call up. » Apparemment, il n’a pas perdu autant de neurones que ça – il est juste idiot. Même s’il a vraiment besoin de me parler, comme il dit, il n’avait pas besoin de prendre autant de risques. Je ne suis pas en colère après lui, même si j’ai bien conscience que mon comportement de cette semaine a pu lui faire penser le contraire. Et même si j’étais en colère, j’aurais eu assez de décence pour ne pas le laisser pourrir sous la pluie. Ma déclaration semble l’étonner et je hausse brièvement les sourcils. « You… Wait… What ?! You aren’t ? But… » J’ai presque envie de rire devant son bafouillement, mais je ne le fais pas parce que sa détresse m’attendrie et que je me sens toujours coupable. « Why didn’t you answered any of my calls and my texts ?! I was fucking worried ! I thought… » Je tressaille légèrement à l’injure et au ton pressant, accusateur. Alors que j’ai répondu à certains de ses messages, quand même. Il semble prendre conscience que ça ne sert à rien de s’énerver, l’adrénaline diminue et on reprend. Il me salue, comme s’il ne venait pas de débarquer de manière inédite et complètement dangereuse et que notre semblant de discussion n’avait abouti à rien. Je finis par me mettre à sourire, parce que bon sang, ce qu’il est idiot et ce qu’il m’a manqué. La question sur sa stupidité est rhétorique, mais il y répond quand même. « I know. I’m sorry. I… » J’échappe un soupir minime à ses excuses. « I couldn’t wait anymore. It’s driving me insane. » Parce que y’a un peu de ma faute, dedans. I’m sorry for that. Mais je vais devoir le faire attendre un peu plus longtemps, parce qu’il est franchement dans un sale état et que non seulement est en train de salir ma chambre, il doit en plus être inconfortable dans ses habits trempés. Je le laisse quelques secondes, le temps d’aller chercher des vêtements de rechange à sa taille. Il est torse-nu lorsque je reviens, et je peux désormais voir l’énorme hématome qui recouvre ses côtes où il a également reçu un coup. Je regrette un peu de ne pas avoir fait plus attention à ça, aussi. J’ai beaucoup de regrets pour cette semaine passée.

Bart s’approche de moi lorsque je lui tends les habits, mais les jette sans management aucun sur mon lit. « What… » Je commence mais j’ai vite ma réponse puisque je me retrouve dans ses bras l’instant d’après. « Oh okay. » J’échappe un juron en polonais, en plus, parce que c’est un peu de la torture. Comme si mon rythme cardiaque n’avait déjà pas assez souffert, il faut maintenant que je me retrouve contre lui. Contre un lui torse-nu. Son menton repose contre mon crâne et je presse doucement mon visage contre lui, écoutant au passage le battement de son cœur qui n’est pas des plus reposé non plus. « I’m so sorry. I’m such a dick. I didn’t wanted to scare you. I didn’t wanted to act like this. I… » Je ferme mes bras autour de lui pour aller doucement caresser la peau de son dos. Il a un peu froid, Bart. Sans doute à cause de la pluie, et du fait qu’il ne s’est pas rhabillé. J’essaie d’être tendre dans mes gestes, pour qu’il ne se braque pas. J’imagine que, comme moi, il a pu ressasser tout ça cette semaine. Alors je le laisse parler, il faut que ça sorte. « I know I screwed everything up. I’m responsible for all that shit. » Je me presse un peu plus contre lui, en faisant toutefois attention à ses côtes. « You didn’t… Screwed everything up. » J’aurais dû lui envoyer un message plus tôt, mais je ne sais toujours pas… Ce que je veux. De lui, d’un potentiel nous, de moi. J’aimerais avoir les réponses mais je ne les ai pas. Je suis tout de même sûre qu’il n’a pas tout gâché d’un coup… Il bouge et sa tête se trouve à côté de la mienne, son front chaud contre mon épaule. Mes sourcils se froncent légèrement, j’espère qu’il n’a pas de fièvre, pendant que mes doigts viennent glisser dans ses cheveux humides. « I thought about you all week long. » Mon rythme cardiaque s’emballe comme jamais, mes pommettes trahissent largement mon état puisque je les sens me chauffer fortement. Je presse fermement les lèvres l’une contre l’autre pour ne rien dire. « I was completely obsessed by what you last said to me and… The only thing that comes to my mind is that I’ve no excuse for what I did. » Son souffle se répercute contre ma peau à peine couverte et je commence à frissonner. « Things went out of control. It was wrong. » J’embrasse du bout des lèvres sa tempe, comme pour dire que ce n’est pas grave et que c’est déjà oublié.

Ce n’est plus ça qui m’inquiète, dans l’immédiat. C’est mon cœur qui bat trop fort dans ma poitrine, mon estomac qui vole dans tous les sens, mes lèvres qui me démangent et ma proximité avec le brun. « I can’t lose you, Mila. Not like this. Not in any way. You’re so important to me. » Et vers l’issue de la conversation. Je n’en vois qu’une et il est hors de question que je la loupe, cette fois. Je déglutis avec difficulté lorsqu’il finit par se reculer et que son regard se plonge dans le mien. Il est si près que c’est impossible de vraiment le regarder. L’observation de son visage est plus facile, cela-dit. Les détails de sa peau là où elle se plisse, les cernes laissées par la fatigue, l’ossature de ses pommettes et le coquard, les plis sur ses lèvres. « I miss you. So bad. » Je lève une main pour repousser ses cheveux en arrière et empêcher les gouttes de tomber sur son visage. « Missed. » Je le corrige dans un chuchotement. « I’m sorry I’ve been distant. I was trying to… Sort my shit out. » Je hoche la tête, lèvres pincées. « It failed. I couldn’t stop thinking about you, and I missed you like hell. » Je n’ai pas l’impression d’avoir réussi à comprendre, mais je me rends compte maintenant que ce n’était pas tellement ça la question. Parce que j’avais déjà la réponse, que je l’ai là contre moi, mais que j’ai trop peur de l’admettre. Je respire avec difficulté lorsqu’il se saisit de mon visage pour le relever légèrement, bat des paupières lorsqu’il passe sur ma joue pour recaler mes cheveux derrière mon oreille. Killing me softly. « I can change. » Je ne sais même pas si j’ai envie qu’il change, j’aime déjà beaucoup cette version à quelques détails près. Personne n'est parfait. Mon cœur émet plusieurs « !! », juste pour me signaler que ce n’est pas ça qu’il faut que je comprenne. Plutôt le fait qu’il est prêt à changer pour moi.

Presque inconsciemment, je me presse un peu plus contre lui. Ma main qui a essayé de le recoiffer un peu plus tôt était retombée contre son épaule, elle glisse désormais contre sa nuque alors que l’autre appuie un peu plus fermement son dos. C’est tout mon corps qui est en feu lorsqu’il pose ses lèvres sur les miennes. Enfin. Ma réponse ne se fait pas attendre, je ferme les yeux pour mieux apprécier son contact avant de moi aussi appuyer d’une douce pression mes lèvres sur les siennes. J’avais envie de ça depuis tellement longtemps… Le corps se réveille, les papillons dans le ventre et la chaleur un peu plus bas, le cœur qui bat à n’en plus finir. Le baiser devient un peu plus pressé, mes mains voyagent sur son corps caressant tantôt son visage ou fourrageant dans ses cheveux, on se sépare moins d’une seconde pour mieux se retrouver immédiatement. Mes poumons brûlent du manque d’oxygène est ma peau a dû gagner quelques degrés, je l’embrasse une dernière fois avant d’entamer une première pause. J’ai besoin d’une longue minute, le temps de calmer l’entièreté de mon être. Mon front reste contre le sien, mes lèvres effleurent les siennes – comme si j’avais trop peur qu’il ne change d’avis et disparaisse, ou pour mieux repartir à l’assaut. Le souffle retrouvé à moitié, j’attrape ma lèvre inférieure quelques secondes avant de me mettre à chuchoter. « I’m scared. Not of you, but of the falling. » Je sens que je suis déjà trop impliquée avec lui, avec… Peu importe ce qu’il se passe entre nous. Ça ne me dérangerait pas en temps normal, c’est même une sensation que j’apprécie d’habitude. L’aventure de la découverte d’une relation, d’une intimité. Sauf qu’il y a trop de nouveautés dans ma vie et que je prends tous les risques en même temps. Ma capacité à les gérer est limitée. Je peux me débrouiller avec quelques uns. Le déménagement, la nouvelle ville, le nouveau boulot. Mais rajouter à ça en plus une nouvelle relation… C’est d’une hauteur bien trop élevée que je risque de tomber. J’esquisse un semblant de sourire qui ne dure pas. « And a little bit of you, I guess. But not… In the way you think. » Je m’en fiche qu’il ait des problèmes à gérer sa colère, on peut trouver des solutions pour ça. Surtout s’il est prêt à changer. Non, ce dont j’ai le plus peur c’est de ce qu’il peut me faire ressentir.

Go with the flow. Après une arrivée périlleuse de Bart et un semblant d’explications vite raccourci parce que je ne suis pas véritablement fâchée et que s’il ne faut retenir qu’une chose de cette semaine c’est qu’on s’est mutuellement manqué, il me semble évident où le flow va. Entre nos corps irrémédiablement attirés l’un par l’autre, ce besoin de chercher à le rassurer par le toucher et mon rythme cardiaque qui ne finit pas de s’emballer. Je n’ai pas voulu l’ignorer pour le blesser ou parce que je ne voulais plus de lui dans ma vie, malgré ce qu’il s’est passé au dinner. Plutôt le contraire. Les seuls problèmes étant qu’il y a trop de choses à gérer de mon côté, et que je n’ai jamais été véritablement douée pour laisser de la place aux sentiments et à la vulnérabilité. Lorsque ses lèvres rencontrent enfin les miennes, je n’ai plus de raison à trop y penser. J’apprécie Bart, il m’offre un sentiment de sécurité que je ne pensais pas avoir en dehors de mon cadre famille fabriquée ici aux États-Unis, il rend les choses plus simples et surtout surtout il me fait sentir vivante. Pas en auto-pilote, ‘must do whatever it takes to survive’ vivante. Vivante ‘happy and excited to live’ vivante. Et c’est ce qui m’effraie le plus, qu’une seule personne soit capable de ça. En si peu de temps. Alors qu’on se sépare sans véritablement le faire quelques secondes, je glisse quelques mots pour lui faire part de mes incertitudes, première raison de notre semaine éloignés l’un de l’autre. Peut-être première cause de ce moment, alors ce n’est pas forcément une mauvaise chose. Les mains de Bart passent sous mon gilet et je tressaille légèrement lorsqu’elles viennent se poser sur mes hanches, ma peau s’embrasant sous le toucher alors que j’oublie comment respirer. Je suis presque obligée de me retenir de l’embrasser à nouveau, puisqu’il est déjà en train de me répondre et qu’il pourrait le prendre mal si je le faisais taire. « Why would you fall ? I won’t let that happen. » You will, because you will be the reason. Je suis incapable de lui répondre, n’ayant pas envie de l’accuser déjà de quoi que ce soit ni de trop en dire. Il ne joue pas très fair-play, non plus, et son toucher est tout autant distrayant qu’affolant dans mon dos. « I’ll stay. ‘Cause you want me to and I want to stay. » J’arrive à peine à croire qu’il veuille toujours rester après ces derniers jours, mais je ne dis rien parce que c’est vrai. Je veux toujours de lui, maintenant plus que jamais, et c’est ça qui me terrifie. L’une de mes mains vient se placer près de sa mâchoire et mon pouce glisse doucement sur ses lèvres entre-ouvertes, sur l’écorchure y cicatrisant. Stop talking, you’re not making this easy for me. Ou alors, il rend les choses trop faciles et c’est moi qui suit incapable d’en profiter.

Dans le fond, sa force de caractère me fait peur, tout comme sa manière d’être avec moi. Je m’en fiche un peu qu’il soit violent, j’en ai assez vu et il s’est assez excusé pour que je sache qu’il ne le sera pas après moi. Il se met à sourire lorsque je le lui dis, j’enlève mon pouce de ses lèvres même si j’ai très envie qu’il se taise. « Hey… » Arrête, Bart, arrête arrête arrête. C’en devient presque douloureux d’être avec lui, parce que mon cœur bat trop vite et que mon cerveau relâche trop de petites drogues plaisantes et que ça fait beaucoup d’un coup. J’essaie quand même une esquisse de sourire, alors que mon regard court se perdre dans le sien. « I support you for everything. Whatever it is or would be. Whenever you want. » Mes lèvres se pressent fermement l’une contre l’autre, je retiens mon souffle – c’est pas tellement le moment de me mettre à pleurer. Les siennes viennent les embrasser, trop brièvement, comme pour en chasser la tristesse qui menace de s’y échapper. « I’m here, I won’t leave. Let me help you. Let me be here for you. » Mon étreinte se resserre un peu contre lui, j’ignore à quel moment j’ai relâché la pression mais j’ai besoin qu’elle soit à nouveau un peu plus forte. Dedans comme dehors. « I’m here for you too. » Je chuchote contre ses lèvres. J’ai l’impression le besoin vient plus de mon côté, c’est sans doute plus qu’une impression, mais je veux et je suis aussi là pour lui parce que ça marche dans les deux sens. Moi, je n’ai aucune idée d’où est-ce que je vais ni même vraiment de ce que je veux. Je n’ai pas envie d’être un frein pour lui. « I’m scared too. But this is the way life is. It’s scary and there’re always multiple things to think about at the same time. But it’s easier when you share your burden. » Je grimace légèrement avant de me reprendre, parce que c’est une piqûre de rappel que Bart n’est au final au courant que de peu de mon passé. J’ai l’impression de lui cacher des choses et qu’il lui manque beaucoup de pièces pour comprendre le puzzle entier. Qu’il est en train de s’investir à l’aveugle, et qu’il va se rendre compte plus tard qu’il a fait tous les mauvais choix. Je n’ai pas envie de le décevoir, mais je n’ai pas non plus envie de tout lui dire maintenant. Pas le genre de conversation qui commence par ‘by the way’ et se termine en anecdote marrante. « It’s not a thing I’m used to… Sharing my burden. » Je finis par lui répondre. C’est ça, à avoir dû être indépendante très tôt et à tout prendre en charge. J’ai l’habitude de tout contrôler, de faire passer mes émotions et mes désirs au second plan. C’est quelque chose que j’essaie d’apprendre dans ma vie d’adulte, avec beaucoup de difficultés. Sauf que c’est terminé, tout ça. Je n’ai plus à m’inquiéter de Piotr et de mes parents, mais seulement de ma petite vie. Et c’est encore plus terrifiant. « Or having a burden this small. » Who am I, if I’m not saving people ? Mon fardeau c’est donc que je n’en ai plus et que je sais à peine qui je suis ? Sympa. Pas profond du tout comme pensée, il va être ravi Bart. « You’re going to be so disappointed when you’ll se how boring I am as a person. » Je finis par échapper, pas loin d’un rire nerveux.

« I’m stayin’ and I’ll do whatever is necessary to keep you close and safe if you allow me to. » And safe. C’est toujours un sentiment étrange d’y penser, il n’a aucune idée d’à quel point je n’étais pas en sécurité avant. Je n’ai pas le temps de lui répondre qu’il m’embrasse à nouveau, plus pressant cette fois. Mon rythme cardiaque qui avait réussi à sa calmer un peu le temps de notre discussion repart de plus belle. « Please. » J’arrive à articuler contre ses lèvres, ignorant moi-même si c’était une réponse pour qu’il reste à mes côtés parce que je le veux ou une demande pour qu’il fasse quelque chose parce que je le veux. L’envie est partagée et le signal compris. Mes bras sont doucement guidés sur ses épaules, ses mains attrapent ma taille et je décolle magiquement du sol pour atterrir sur le meuble le plus proche – sans que nos lèvres ne se lâchent une seule fois au passage. L’amusement m’échappe dans un souffle, geez Sir I have a bed, mais je ne me plains pas, bien au contraire. Mes mains s’accrochent près de sa nuque et y restent même lorsqu’il se recule. J’ai une certaine satisfaction devant les centimètres gagnés, qui vient se traduire en un sourire bienheureux sur mon visage. « You matter too much for me to let you down. I can’t do that to you, Mila. » Le sourire qui s’agrandit en même temps que l’estomac fait ses petits bonds de bonheur. J’échappe un long soupir, décroche mes mains pour aller tendrement lui caresser une joue. « You’re crazy. And way too good for me. » Je souffle, clignant des yeux à plusieurs reprises avant d’aller effleurer ses lèvres. « I’ll try to not mess it up either. » Je promets, n’arrivant pas à formuler autre chose ni à lui donner autre chose pour le moment. Not good with feelings. J’espère que c’est suffisant, pour l’instant, et reprends doucement l’assaut de ses lèvres. Mes jambes viennent naturellement se fermer autour de lui, pour le garder près de moi, mais c’est un détail peu agréable qui me fait frissonner. Le jean est toujours trempé, et froid. Ma main passe lentement contre son torse, je me recule légèrement pour le regarder en me mordant doucement la lèvre inférieure. Le bout de mon index glisse entre le jean et la peau. « Pants. Off. » J’ordonne d’une voix que j’essaie de rendre plus suave – le suave des pays de l’Est certes. Mission séduction de Bart lancée. Je n’ai pas envie d’ignorer mes désirs – et les siens – plus maintenant. Je jette un coup d’œil à mon lit, derrière lui. Des fringues jetées dessus à pousser, et surtout mon ordinateur en veille, à ne pas réveiller puisqu’il y a encore mon fichier Excel d’ouvert dessus et que j’apprécierai qu’il ne le voit pas. Il grimpe deux étages et je fais des feuilles Excel, dans le genre con… J’attends qu’il se soit débarrassé de son jean et ai repris sa place pour l’embrasser à nouveau, me plaisant de ces nouvelles sensations et de toute la chaleur que ça réveille dans mon corps. « Don’t look at it right now but I might have a bed. » Je glisse entre deux baisers, l’air largement amusée. J’échappe de son étreinte pour embrasser sa mâchoire et glisser jusqu’à son oreille où je chuchote lentement trois petits mots. « We’re alone. » Et heureusement, parce que depuis tout ce temps la porte est grande ouverte.

« I know. I feel it now. » Now. Une grimace contrariée passe brièvement sur mon visage. I’m sorry you didn’t feel it sooner. La vérité, c’est que Bart a décidé de s’enticher de la nana la moins stable de San Francisco. Je devrais peut-être me trimbaler avec un panneau ‘en construction’, pour voir. C’est injuste pour lui, qui se montre pourtant si compréhensif et patient. J’essaie de le prévenir,  que ce n’est pas tellement une chose dont j’ai l’habitude, de partager mes ennuis – mais je suis prête à essayer, pour une fois. Pour lui. « Take all the time you need. » Too good for me. J’exagère une grimace mais j’ai dû mal à dissimuler le sourire qui veut prendre place sur mes lèvres. Il va tomber de haut, quand il va s’apercevoir que je ne suis peut-être pas la personne qu’il s’est imaginée – une version améliorée de Mila amplifiée seulement par la nouveauté. « I won’t. The person you’re is the one I like that much and you’re not boring at all. I know for sure that you are not going to be like this. » J’échappe un rire un peu plus heureux cette fois. Il est bien trop optimiste, mais je ne vais pas m’en plaindre. Nos bouches se retrouvent pour mieux se découvrir, l’échange est moins doux et hasardeux, déjà plus compromettant et affolant. Bart décide de tester la solidité de mes fournitures, le lit étant apparemment trop conventionnel pour les désirs de Monsieur. Une dernière promesse glissée entre deux baisers électriques, il ne me laissera pas tomber et j’essaierai de ne pas tout gâcher. Un avenir presque lumineux malgré le brouillard dans lequel nous nous avançons – pas dans l’immédiat mais plus loin. « We’re both crazy and everything is gonna be alright between you and me. » Je me mords légèrement les lèvres mais l’esclaffement bienheureux est déjà passé. Je hoche négativement la tête, en revenant à peine que tout ça soit réellement en train de se passer et que Bart n’est pas le fruit de mon imagination. Juste pour être sûre, si jamais ses mains contre mes hanches et son corps contre le mien n’étaient pas suffisants, je reprends l’assaut de ses lèvres avant tout de même commander qu’il retire son pantalon. Mon cœur sursaute devant son sourire joueur, je l’observe faire avec un air appréciateur. J’ai presque envie de lui demander de faire un tour sur lui-même, juste parce que je sais que ça pourrait le faire chier, mais ce n’est pas le moment. L’envie de m’abandonner à cette nouvelle danse est trop importante pour que je ne la gâche moi-même. Je lui précise tout de même que j’ai un lit, si jamais il ne l’avait pas vu. « I’m not interested in your bed right now. Let us enjoy your fournitures before ending up there. » Un son espiègle m’échappe – ah ! « My fournitures are new and I would like to keep them for a while, Bart. » Je commente, l’air très sérieuse, avant d’embrasser le chemin jusqu’à son écoutille pour lui glisser sans aucune subtilité que nous sommes seuls.

Message reçu.

Mes épaules sont rapidement dénudées et je frissonne au passage de mon gilet sur mes bras. Je le laisse faire et observe son visage si sérieux alors qu’il découvre mon corps en l’effeuillant. Il est terriblement beau, dans ce mélange de sérieux corrompu par le désir qui brûle doucement en lui. Mon rythme cardiaque n’a de cesse de s’emballer et je finis par rendre les armes de la raison, ne réfléchissant qu’à peine pour mieux savourer les sensations. La danse, je la connais, même si c’est notre première fois ensemble. Je ferme les yeux pour savourer les frissons laissés par ses lèvres humides dans mon cou, les caresses de ses mains contre ma peau et la brûlure que ses doigts semblent procurer lorsqu’ils glissent sous l’un des derniers vêtements qui me reste – bien vite retiré lui aussi. Il prend une pause, prédateur admirant sa proie, et je vois bien que ce qu’il voit lui plaît, ce qui ne me donne qu’envie de continuer. Ma main retrouve sa nuque lorsque l’assaut reprend, l’autre se perd dans ses cheveux lorsque mes yeux se ferment et que toutes les sensations agréables de mon corps commencent à se manifester sous forme de sons appréciateurs. Mes fournitures ne sont finalement pas testées très longtemps et mon dos vient vite trouver la douceur du matelas, les affaires dessus à peine soigneusement écartées par Bart et un rire m’échappe devant cette impatience. Je n’en suis pas moins ravie de l’avoir à nouveau contre moi, ses lèvres rencontrant les miennes encore et encore et ma main parcourant sans aucune honte son dos pour en dessiner les os et les muscles du bout des doigts. Je sens Bart hésiter et rouvre les yeux, inquiète une seconde. « Do you want me to go on ? » L’une de ses mains est dangereusement proche de mon bas ventre alors que son regard plonge dans le mien. Mon souffle s’accélère légèrement. « Do you want me to push you through the window ? » L’impatience. Le ton est presque menaçant, j’humidifie légèrement mes lèvres avant de reprendre plus doucement. « With all due respect, of course. » Shut up, Darling. Mon insolence me coûte, puisque le brun décide de me tourmenter en me regardant, un sourire taquin sur les lèvres. Fourbe. « Bart. » Je siffle, impétueuse, avant d’échapper un juron lorsqu’il finit par céder à ma demande. Mon corps entier se réjouit de ses caresses, je ferme les yeux tout en échappant d’autres sons alors que mon souffle trahit mon état euphorique. Je m’accroche un peu plus fermement à lui, oubliant presque de faire attention à ses côtes. « You’re beautiful. » Et il me rend folle. J’attrape trop brièvement ses lèvres avant de lui répondre. « You’re making me crazy. » Il me faut plusieurs secondes pour me rendre compte que les mots ont été glissés en polonais et qu’il va avoir du mal à les comprendre. Je n’ai pas l’impression que ce soit très important, pourtant. « Fuck. » Je rectifie, avant d’être cueillie une nouvelle fois de ses lèvres. L’instant d’après, il se charge de nous débarrasser de nos derniers vêtements et la danse s’élance, s’emballe, s’emporte et se passionne au rythme des corps qui se rencontrent doucement, fiévreusement, follement, inlassablement.

Mon corps est fiévreux et mon souffle lourd et erratique alors que mon corps est toujours emmêlé à celui de Bart. Des vagues d’endorphine prennent d’assaut tout le reste, j’arrive à peine à penser. Un sourire épanoui prend place sur mes lèvres alors que je relève légèrement la tête pour pouvoir le regarder. Je finis par tendre une main pour aller caresser délicatement une joue puis ses cheveux – surprise, Bart boucle légèrement avec la pluie. Un rire bienheureux n’est pas très loin non plus. J’hésite quelques secondes, ayant peur de gâcher le moment en ne trouvant pas les bons mots. Mais après ce qu’on vient de partager, il n’y a pas de mauvais mots. « I’m glad you’re here. » Je plonge mon regard dans le sien, comme pour y réfléchir à deux fois. « And I'm happy. » Je me tends un peu pour pouvoir aller embrasser ses lèvres, comme si le contact me manquait déjà. « In seventh heaven. » Que je rajoute avant de me mettre à glousser – celui-là est pour l’activité peu catholique à laquelle on vient de s’adonner. C’est bon, on a compris l’idée ? Bon, très bien. Je garde le sourire, incapable de le chasser. « But next time, I beg you, use the front door. » Pour notre bien-être à tous les deux, et aussi pour la gouttière qui a autorisé une escalade mais n’en permettra peut-être pas deux. Je reste contre Bart de longues minutes, le temps que mon corps reprenne un fonctionnement à peu près normal, profitant de sa chaleur et du confort qu’il m’offre avec sa simple présence. Je grimace lorsque je me décale légèrement, m’infligeant moi-même le châtiment mais trouvant quand même l’opportunité de râler. « Do you want to take a shower ? Have some dinner ? » Il fait nuit, maintenant, et je n’ai pas très envie de le mettre à la porte. J’ai plutôt envie de le garder près de moi, avec peut-être un peu plus d’habits pour qu’il ne tombe pas malade. Je n’ai pas non plus envie de le forcer. Hanna et Szymon doivent rentrer au petit matin et je ne sais pas si Dawn rentre dormir ou non, mais elle sera aussi là au réveil alors… Ça fait beaucoup de conditions à prendre en compte, pour une première nuit. « You can… Stay the night… If you want ? And if you’re not scared of running into the Jaroszewicz in the morning. »

Si quelqu’un a un instant douté de la beauté de Bartholomew Wiley, iel a sérieusement besoin de consulter un docteur des yeux – ou du cerveau, c’est peut-être le message qui est mal interprété. J’aime bien les gens beaux, c’est un petit plaisir coupable de la vie. D’une certaine manière, tous les gens sont beaux parce que la laideur c’est subjectif et qu’on a tous un petit truc de correct, le petit défaut qui rend le tableau humain et parfait. Mais Bart, c’est un vrai beau. Je n’ai pas vraiment de type de beauté mais pourtant il semble rentrer dans tous les critères, entre ses yeux bruns chaleureux et ses pommettes prononcées et sa mâchoire carrée. Sa beauté est presque ridicule, mais lorsqu’il arbore cet air de bien-être absolu une fois sous endorphine, y’a plus rien à faire : je craque. Mon corps entier est secoué de spasmes et autres tremblements après le plaisir reçu, mais mon estomac arrive encore à se contracter lorsqu’il ferme les yeux quand ma main passe dans ses cheveux. Une once de sourire fait remonter mes lèvres avant que je ne décide de prendre la parole, mots prononcés entrecoupés de baisers comme si nous ne pouvions plus vivre sans le contact l’un de l’autre – c’est peut-être le cas. Je suis heureuse qu’il soit là, et pas seulement pour ce qu’il vient de se passer. Mais parce que, finalement, une semaine sans Bart c’était une semaine longue, nulle et stressante et que je n’ai pas envie d’en vivre d’autres des pareils. Ça m’effraie, d’être déjà aussi dépendante de quelqu’un. D’un homme que je ne connais que depuis peu. Mais c’est comme ça, je n’y peux rien. Peut-être qu’il faut juste que j’apprenne à lâcher prise. « You’re incredible. » Mon sourire est toujours présent et je me mords la lèvre pour ne pas me mettre à rire une nouvelle fois. Dans le genre pas capable de prendre un compliment. « Shh. » Je proteste, le nez plissé et mon regard perdu dans le sien avant qu’il ne se décide de tendrement parcourir le haut de mon corps. Je décèle une légère tendance maniaque du contrôle, à toujours prendre le soin de replacer mes mèches folles. J’attends que son toucher s’attarde pour interrompre une nouvelle fois le silence. S’il tient vraiment à me tuer, je préfère que ce soit parce qu’il est trop gentil et doux plutôt qu’avec ses tendance suicidaires. « I promise. But when I’m worried, I’m capable of the worse. So… Talk to me instead. » Le plissement de nez n’a rien de mignon cette fois, il est plutôt très embêté. « Right. » Ça restait un peu délicat, comme situation, non ? Pas le genre de truc qui explique un appel en plein milieu de la nuit. J’imagine assez la conversation : « hi, so you kinda freaked me out yesterday and by the way i’m more and more attracted to you and i don’t know what to do, should we make out for 5 minutes and figure it out ? », peu conventionnel. « I’ll do that now. » Maintenant qu’on a résolu une bonne partie du problème…

C’est parce que nous sommes qu’au début de la soirée, après tout ça, et que nous ne sommes pas connus pour avoir les meilleurs rythmes de sommeil que je trouve la force de me détacher légèrement de lui pour lui proposer de prendre une douche et de manger. Son petit grognement de mécontentement me met presque dans tous mes états, same Mew-Mew, same mais je tiens bon. « I can’t say no if you ask. » Je plisse légèrement les yeux. « You can’t say no if I make you dinner. That would be rude. » Mais s’il n’a pas envie de manger – ou même de rester, même si je risque de le prendre un peu plus mal ça – il peut aussi dire non. « Unless you’re still afraid that I’ll poison you. » Je rajoute avec un sourire amusé sur les lèvres pendant que je commence à me rhabiller, faisant référence à notre premier rencard qui, bon sang, me donne l’impression de dater déjà. La petite histoire de l’envie de cuisiner lorsqu’on me tient galamment la porte, repas qu’il a refusé parce qu’il est mauvais perdant. Je lui propose de rester la nuit, s’il le veut également. Mon lit lui est disponible, il y a juste la complication Jaroszewicz à prendre en compte. « I want to stay. » Il finit par me répondre, son inspection de plafond terminée. « Yeah ? » Je demande, avec une graine d’espoir sortie de nulle part. « I’m not my brother, I’m not scared to meet your family. » Ça me fait presque bizarre, qu’il désigne les Jarosz comme ma famille, et en même temps ça me fait beaucoup de bien. Right, they are my family. L’idée qu’il ne rencontrera jamais mes vrais parents est extrêmement réconfortante. « That’s great. And I’ll fail to mention exactly how you ended up here and everything should be alright. » Minus le harcèlement affectueux que je risque de me récolter si les parents ou pire, Dawn, rencontrent Bart au petit matin et que la raison de sa présence ici soit rapidement comprise. Yep, Mila totally hooked up with the random dude she almost punched weeks ago.

J’invite le brun à me suivre jusqu’à la salle de bain, lui sors une serviette de bain avant de le laisser seul. Non que l’envie de rejoindre n’est pas présente, mais s’il propose pas aussi. Je file dans ma chambre récupérer ses fringues mouillées pour pouvoir les descendre au sèche-linge en bas, fais un détour par la salle d’eau du bas pour une rapide toilette avant de rejoindre la cuisine. C’est là que ça me frappe, soudainement. Que je ne connais pas grand-chose des goûts culinaires du brun, ignorant en conséquence ce qui pourrait lui faire le plus plaisir. Je sors du congélateur des sachets de légumes frais, découpés et empactés par mes soins, et les dispose sur le plan de travail – me retenant de justesse de les passer sous l’eau chaude tout de suite parce que Bart est déjà en train de l’utiliser. Je tends l’oreille et tourne la tête avec un sourire sur les lèvres lorsque Bart descend les escaliers. Ça a été rapide, finalement. « Do you need help ? » Je n’ai pas le temps de répondre qu’il est déjà dans mon dos, son avant-bras me guidant contre lui pendant que ses lèvres viennent embrasser – et faire frissonner – ma nuque. Fuck him. Mon rythme cardiaque s’accélère et mon sourire s’agrandit. Je ferme les yeux quelques secondes, essayant de garder mon sang froid, avant de lui répondre. « Nope, all good. » Tout est déjà coupé, y’a plus qu’à choisir et attendre que ça cuise. « But pick, please. » J’attends qu’il me désigne les sachets et ne bouge pas, profitant de sa chaleur et de son étreinte encore un peu. Je relève légèrement la tête pour pouvoir le regarder, et décidément je ne vais pas m’en lasser. « Hi handsome. » Je glisse, toujours en souriant, un rire au fond de la gorge. Étais-je prête pour la domesticité d’un moment avec Bart ? Non pas du tout. Vais-je peut-être en mourir parce que mon cœur risque d’exploser. Peut-être. Je gigote légèrement pour pouvoir me retourner, sans jamais véritablement m’éloigner de lui. J’aborde soudainement un air très sérieux, les sourcils froncés et l’air accusateur, alors que mes mains prennent place sur ses épaules. « Actually, do you know how handsome you are ? It’s insane. Who gave you the right to be this pretty, uh ? With this… ? » This consiste à tripoter ses pommettes et sa mâchoire du bout des doigts, avant d’écraser doucement ma main entière sur son visage – pas capable d’être sérieuse trop longtemps non plus. J’échappe un léger rire lorsqu’il se recule. Apparemment, les soucis de ‘oh my god Bart Wiley is a handsome and awesome dude what do i do’ réglés, je retrouve mon côté joueur et ma langue se délie. « You have no idea how many times I wanted to kiss you before. I’m definitely going to do that a lot more now. You’re going to complain. » Mais le bureau des plaintes n’est ouvert qu’une minute par jour, à horaire changeant évidemment, tant pis pour lui. Je m’occupe finalement de mettre les légumes sur le feu, lorsque le sérieux est véritablement retrouvé. « Y’want a visit ? » Je propose, pour faire passer le temps pendant que le repas ne cuise.

Je ne suis pas certaine que le sourire baratineur qu’il arbore lorsqu’il me glisse tranquillement que les parents Jarozs découvriront bien l’entourloupe soit énonciateur de bonne chose. Il va falloir que je pense à vérifier l’état de la gouttière et de ce qui l’entoure mais si jamais : je nie tout. Après ça, c’est direction la salle de bain puis la cuisine. Un semblant de familiarité qui se met en place et qui fait encore déconner mon rythme cardiaque. Je pense brièvement que je devrais avoir l’habitude avec Bart, parce que c’est un peu ce qu’il se passe dès que je me retrouve en sa présence. Et même lorsque nous ne sommes pas ensemble et que l’échange se contente d’être à distance. Il a le don pour me faire sourire comme une imbécile, je ne sais pas comment il fait mais c’est assez injuste. J’ai une réputation à me faire, ici, voyons. Le repas est choisi dans le plus grand des hasards – whatever qu’il dit – et je n’ai pas l’impression que ce soit ce qui nous intéresse le plus. Je finis par relever la tête pour le regarder, comme si j’avais besoin de ça pour vérifier de la réalité de sa présence ici, avant de le saluer. Le palpitant qui s’affole lorsque ses lèvres trouvent presque naturellement les miennes. « Hi gorgeous. » Le rire qui s’échappe dans un esclaffement avant que je ne me retourne. Parce que je suis bien décidée à gagner à ce jeu, et parce que j’ai l’impression que j’ai le droit de lui confier à quel point il est agréable à le regarder, je m’y essaie. Mais je suis terriblement maladroite, et préfère finir mon apologie en une plaisanterie à peine drôle. Je me mets à rire lorsqu’il grimace sous mes mimines, que je dégage quand même rapidement. Y’a pas à dire, she’s great at flirting. Bart n’a pas l’air de m’en tenir rigueur parce qu’il sourit également. « I could ask you the same thing. Like, you’ve got the prettiest nose, the softest skin and lips and the most beautiful eyes I’ve ever seen. » Je plisse les yeux avant de me mettre à hocher négativement la tête au fur et à mesure qu’il parle. C’est pas que je ne suis pas d’accord, mais c’est surtout que je ne suis qu’humaine. Le sourire sur mes lèvres trahit tout de même mon ennui exagéré. « Sounds like I’m a catch. Maybe I should try modeling with Empress Ginny. » D’après ses compliments, je ferais une excellente mannequin lunettes, ça se tente. J’exagère tout de même une grimace avant de finalement me détacher de lui – le repas ne va pas cuire si on ne lui met pas le feu aux fesses. Oui ça peut être risqué d’utiliser cette expression hors contexte mais je le fais quand même.

Je commence à préparer le repas, même si préparer se résume à passer le sac sous l’eau chaude avant de le jeter dans une poêle. Je garde mon attention sur Bart que j’observe du coin de l’oeil – ça va, il a l’air de prendre ses aises relativement facilement. Ça me colle un sourire sur les lèvres, sourire que je garde pour l’informer tout en désinvolture que j’ai déjà pensé à l’embrasser de nombreuses fois avant qu’il ne se décide à le faire ce soir. Maintenant que la porte est ouverte pour ça, je ne compte pas m’en priver – et il risque de se plaindre. « I won’t, you’re so cute. I’ll always ask for more and kiss you back. » Ta-ta-ta, je hoche une nouvelle fois la tête. Laisse-moi gagner, Bart Wiley, bon sang. « No no no ! You’ll complain of my clingy ass very soon. Wanna bet ? » Pourquoi est-ce que j’ai besoin de tout tourner en dérision ? Peut-être parce c’est plus facile ainsi. Parce que tout devient sérieux trop vite lorsqu’on devient intime, et même s’il a promis de rester parce qu’il en a envie et que j’en ai aussi envie je ne peux pas empêcher cette peur rampante de prendre place dans mon esprit rationnel. Se faire envahir par des sentiments ? Pas question. Trop risqué, trop dangereux, on ne sait pas où on va. Et pourtant c’est un risque que je suis prête et en train de prendre. Ce n’est pas comme si j’avais eu le choix, il s’est un peu imposé l’bonhomme. « I was dying to kiss you in my car, after our first date. But… I didn’t wanted to rush things, you know ? » J’esquisse un léger sourire à ça, parce qu’il m’a presque tué en manquant de m’embrasser – mais il a raison, c’était trop tôt et penser à lui et à ce qui aurait pu se passer m’a tenu éveillée une bonne partie de la nuit après et c’était tout aussi bien. Je ne sais pas s’il y a un moment parfait pour ce genre de choses, mais je ne regrette pas qu’on ait attendu ce soir pour passer ce cap. Comme s’il était inévitable que nous le passions. « I didn’t planned to do it tonight either but… I don’t know. I couldn’t resist anymore and I thought… that maybe… The feeling was mutual so I tried. » Un léger rire m’échappe et je finis par me tourner vers lui, sans toutefois l’approcher. Je me retiens de lui confier que je ne pense pas qu’il avait beaucoup de choses de prévues pour ce soir – vu son entrée fracassante. « You know I would have kissed you if you didn’t, right ? » Parce que c’était trop, après cette semaine et après tout ce qu’il s’est passé, avec son corps contre le mien et ses paroles pressées pour se justifier… Le bon moment, finalement. « I wasn’t sure. First, I thought that you’d have slapped me. » Mes sourcils se froncent légèrement à ça, et devant son rire nerveux. Je n’aime pas ça. Qu’il puisse avoir ce genre de pensées ou m’imaginer capable d’une pareille chose. Notre rencontre hasardeuse exclue, je ne suis pas une personne violente de nature, et clairement pas avec les personnes que j’aime. Ce n’est pas le genre de réflexe que j’ai développé, pas un que j’ai envie d’acquérir non plus. Mais j’ai l’impression qu’il y a plus, parce que ça a l’air d’être une évidence pour lui. Je souffle légèrement, inclinant la tête avant de lui répondre avec prudence. « I would never hit you, Bart. » C’est une promesse que je peux faire sans douter de la difficulté que j’aurais à la tenir, mais je la fais parce que c’est important. Je n’ai pas envie qu’il se fasse ce genre de scénarios – y’en a des plus amusants à envisager.

Le temps que le repas cuise, je lui propose de faire un bref tour de l’appartement. Si jamais il se décide à rester dans le coin, autant qu’il connaisse les lieux, ça évitera une entrée ou une sortie dramatique comme celle-là. « Oh, the front door is here. » Je lui glisse un regard qui veut tout dire – olala quelle chose incroyable, une porte, franchement t’abuses – mais échappe quand même un rire. « You’re an idiot. » C’est important qu’il le sache, quand même. On avance dans l’espace salon, je le laisse observer avant de désigner l’une des photos encadrées sur le mur. « That’s me as a young human. » La seule photo où j’apparais, rajoutée après mon arrivée parce que je fais officiellement partie de la famille, une prise au septième anniversaire de ma meilleure amie. À l’époque, on ignorait qu’on n’allait pas tarder à être séparées et tout allait superbement bien dans nos petites vies d’enfants, nos problèmes se résumant à nos cheveux emmêlées et nos dents qui tombaient. C'était sans doute le temps le plus calme et le plus simple de ma vie. Avant que tout ne devienne compliquée, que mes parents ignorent la maladie de mon petit frère et que je ne prenne les choses en main, avant que je ne comprenne le réel problème au sein de la famille... Et après tout ça, il y a la vie d'adulte, et on est les seuls capable de prendre les décisions et à blâmer quand ça ne va pas comme on veut. Je pose mon regard sur Bart, ignorant si les choses vont vraiment comme je le veux, avant de hausser les sourcils. Les choses ne vont pas mal, quand même. « Have you ever thought about how people meet under the weirdest circumstances ? » Je n'aurais pas atterri ici si mes parents n'étaient pas les pires parents de l'histoire, si Dawn et ses parents n'avaient pas décidé de se fixer à San Francisco... Et rien que ça fait beaucoup de petites choses et de grandes décisions qui expliquent ma présence ici dans cet instant T. C'est pareil pour Bart, dans son chemin de vie. Ça me semble toujours si étrange la manière dont je rencontre de nouvelles personnes, j'ai l'impression que je ne devrais pas être là et j'ose à peine y croire. C'est un sentiment qui m'envahit beaucoup depuis que j'ai recommencé une vie sur le continent américain. Avec le sauveteur, c'est encore pire. Parce qu'il rend les choses si faciles et normales que j'ai peur de tout inventer depuis le début.

Mes sourcils sont légèrement froncés et ça cogite, fort. Même s’il a l’air de plaisanter, qu’un jour je vais finir par le frapper malgré le fait que je viens de dire que non, il insiste et je n’aime pas ça. Je ne me sens pas à l’aise dans ce scénario, dans une plaisanterie de ce genre mais j’ai l’impression qu’il y a quelque chose de fondé derrière. Un passif qui explique sa méfiance tournée en dérision. La question ‘who hurt you’ me brûle les lèvres mais je la retiens, parce qu’elle a l’air trop… Personnelle, d’un coup. Je n’ai pas envie qu’il m’interroge sur mon passé et mes parents et la Pologne, j’imagine que la réciproque est vraie également alors je me tais. On commence notre courte visite de l’appartement pendant que le repas chauffe. Il se marre comme un imbécile lorsqu’on passe devant la porte d’entrée – incroyable invention que nous possédons pourtant depuis des siècles. J’ai un sourire sur les lèvres lorsqu’il s’attarde sur les consoles et les jeux dans le salon, petites reliques gardées précieusement au fil des années par les Jaroszewicz. Je finis par lui désigner l’une des photos affichées dans la pièce – la seule sur laquelle j’apparais. Narcissisme, quand tu nous tiens. « Woah. Seems like someone just lost her incisors. » Je lève les yeux au ciel pour la bonne mesure, mais garde un sourire sur les lèvres. « My parents are dentist, losing my teeth was a nightmare. » Je glisse presque délicatement, parce que j’ai toujours un peu peur de parler de mes parents et d’attiser la curiosité qui amènerait à d’autres questions. Mais ce détail ressemble plus à une anecdote, qui passe sans qu’on ne cherche à en savoir plus. Je prends quand même le soin de changer le sujet, finalement peu encline à parler du passé. Mon présent semble être enveloppé de brouillard, le même qui règne sur la ville, et toutes mes rencontres semblent presque irréelles. Il y a tellement de facteurs à prendre en compte quand on pense à la manière dont nos chemins se croisent, l’effet papillon qui ne tient qu’à un cheveu. Je crois que je suis partie trop loin, cette fois, parce que c’est d’abord l’air perdu de Bart qui m’accueille. « Not… Really. » All right then. Ça m’arrache un léger rire. « If life was a video game: we’re always a choice away from a different path. Some of the choices are not ours, we can’t exactly decide of our background story, but what if the rest… Is up to us, or chance, or fate, or wathever you want to believe in ? » Et pour les gens normaux qui partent avec quelques mauvaises cartes en mains, les chemins sont souvent faits au fur et à mesure et bizarrement. « Now that you mention it… We kind of did, you and me. And it happened with all my friends. » Je souris légèrement. On ne se serait pas rencontré si j’étais resté en Pologne – ça c’est sûr. Mais on aurait pu ne pas se rencontrer si je n’étais pas amie avec Dawn, si Dawn n’était pas devenue amie avec l’une de sa troupe, plus avec l’autre plante verte. Notre rencontre hasardeuse à la plage n’aurait pas eu lieu si je n’avais pas décidé d’y aller, et l’histoire aurait pu être tout autre. Ou ne pas être, du tout, même. Et ça, c’est juste une partie de l’iceberg des choix de mon côté. Peut-être que c’était écrit quelque part et qu’on n’en sait rien. Peut-être que c’est juste un hasard et le fait que ça fonctionne rend la vie à la fois absurde et intrigante. Le hasard des choix, le destin des rencontres. « But… Everything started pretty late. I was fifteen when I arrived here. I almost can’t remember my life in New Mexico. » Je me mords les lèvres, essayant de réfléchir si je me souviens de mon enfance. Vaguement. Les souvenirs les plus importants étant généralement appuyés d’une photo, le reste est résumé en une sorte de sentiment envahissant qu’on fait passer en haussant les épaules. « Background story. Now the choices are yours. » Je vais me lancer dans la théologie des jeux vidéos, ça peut être un plan de retraite comme un autre.

Le rez-de-chaussée est rapidement visité, il a déjà vu l’ensemble des pièces accessibles à l’étage. Je m’apprête à lui proposer de retourner dans la cuisine lorsque la porte d’entrée est malmenée – Dawn. Je m’arrête soudainement, le rythme cardiaque s’emballant un peu. Le juron est à peine retenu. Je m’étais préparé à l’idée que la blonde allait découvrir la présence de Bart chez nous, mais pas si tôt quand même. La voix de ma meilleure amie râlant qu’elle est fatiguée nous parvient et je commence à me mettre à sourire lorsque mon regard croise celui de Bart. Okay, we’re doing this I guess. Je me détourne de lui pour pouvoir accueillir Dawn comme il se doit, Dawn qui s’arrête en plein milieu de phrase et du couloir lorsqu’elle voit finalement que je ne suis pas seule – et surtout qui m’accompagne. « What the hell are you doing here ? » Mon nez se plisse et je me mords légèrement les lèvres, me retenant de rire. Y’a juste toutes les petites discussions qu’on a eu au sujet du brun dans mon dos qui me reviennent, pour finalement en arriver là… « No… Way… » Qu’elle dit, l’allure de chouette avec le regard perçant qu’elle aborde en me fixant. Un petit rire m’échappe, mais j’arrive à me reprendre rapidement. « Yes ? Way ? » J’exagère une grimace et ma réponse ressemble plus à une question – mais elle fait très bien le calcul toute seule. Bart décide finalement de la ramener avec son habituel air taquin qu’il arbore avec la blonde, maybe a little bit too smug this time. « No, I don’t want to know. » C’est faux, elle va me demander de tout lui raconter minute par minute dès qu’on sera seule. Maintenant qu’elle a compris et accepté la scène qui se déroule sous les yeux, elle reprend un peu ses esprits et nous sort son plus beau rôle de dramaqueen. Le coin de ses lèvres qui s’étirent dangereusement vers le haut ne trompent personne. « I really wanted to sleep in my own bed. You couldn’t pick another day ? And that’s my father’s trousers ! » Je lève légèrement les yeux au ciel, le sourire un poil trop grand, alors que Bart est déjà en train de répondre. « So sorry to interrupt your schedule, Ma’am. » Promis, on va commencer à faire des plannings pour savoir quels sont les moments les plus propices pour des gestes presque romantiques et complètement cons sortis de nul part. Non pas que j’ai envie que ça se reproduise Dawn cavale les escaliers pour monter dans sa chambre et je commence à revenir vers la cuisine alors que le sauveteur est déjà en train de beugler qu’elle peut très bien aller pieuter chez une autre connaissance commune. Je me retourne pour lui faire face, les sourcils légèrement haussés. « What ? » Je hoche négativement la tête, souriant tout de même. « Very subtle. » Je me permets de commenter, et on n’a pas le temps d’en débattre que Dawn est déjà de retour – avec le sac de squattage. Je retiens à peine un rire. « Even if a nuclear war started outside, I wouldn’t stay and I know were to go. Bye ! See you tomorrow. Good luck to explain your presence to my parents. » She’s so dramatic. Déjà, si on était en pleine guerre nucléaire, on serait tous morts et la question ne se poserait même pas. Et en plus, si jamais les parents Jarosz débarquent et qu’ils croisent Bart, ça s’explique d’un « yeah I invited a friend over hope that’s okay », une blague de Szymon et une reprise d’Hannah et ce sera sans doute terminé. Dawn oublie un truc, tout de même, alors elle est obligée de revenir en arrière. « Full report tomorrow. » Ah, voilà. Je pose une main devant ma bouche, ayant la décence de prendre un air coupable. « Of course, Love. See you tomorrow. » Pas de doute quant à sa destination, pas besoin d’excuses pour le dérangement occasionné par la présence inattendue de Bart. Qui décide de faire le malin en répétant ses mots, arrachant quelques mots criés à la blonde avant qu’elle ne parte définitivement. C’était donc un passage express. Je me retourne vers le brun, sourcils une nouvelle fois haussés. « What ?! » Je secoue légèrement la tête. « You. are. an. idiot. » That’s what. Je répète, articulant chaque mot avant de me mettre à rire et de me rapprocher une nouvelle fois de lui pour le serrer dans mes bras. Je reste quelques secondes contre lui, mon front posé contre la peau chaude de son cou, avant de soupirer légèrement. J’ai toujours un sourire sur les lèvres lorsque je le lâche, parce que pour la première fois depuis un très long moment, je me sens pleinement heureuse et que c’est un sentiment auquel je pourrais prendre goût rapidement.